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30 mai 2013 4 30 /05 /mai /2013 06:58
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30 mai 2013 4 30 /05 /mai /2013 06:57
L'argumentation du Conseil constitutionnel dans sa décision du 17 mai 2013 conduit au rejet de l'existence d'un Principe fondamental reconnu par les lois de la République concernant l'altérité des sexes dans le mariage . - L'ouverture du mariage aux personnes de même sexe relève selon lui d'une question de société et ne concerne pas les droits et libertés fondamentaux

Sommaire

Ces brefs propos n'ont pour objet ni de prendre parti sur la loi relative au mariage entre personnes de même sexe, ni d'analyser au fond la décision du Conseil constitutionnel qui s'y rapporte (Cons. const., déc., n° 2013-669 17 mai 2013 DC : Journal Officiel 18 Mai 2013), mais de mettre en exergue l'argumentation du Conseil conduisant au rejet de l'existence d'un Principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) concernant l'altérité des sexes dans le mariage. De ce point de vue, le commentaire publié sur le site du Conseil est éclairant.

En effet le Conseil rappelle les critères qui permettent la reconnaissance d'un tel principe : ancrage dans un texte républicain antérieur à 1946, absence de dérogation par une législation républicaine antérieure à 1946 et degré de généralité du principe intéressant la vie de la Nation « comme les droits et libertés fondamentaux, la souveraineté nationale ou l'organisation des pouvoirs publics ». Or s'agissant de la définition républicaine du mariage, le Conseil estime cette condition non remplie car l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe relèverait d'une question de société et ne concernerait pas les droits et libertés fondamentaux.

Cette analyse inspire plusieurs réflexions.

Elle s'inscrit d'abord dans une conception purement individualiste des droits et libertés. Or les articles un et deux de la Déclaration de 1789 posant le principe selon lequel les hommes naissent libres et égaux en droit et rappelant l'existence de droits naturels et sacrés, de même que le Préambule de la Constitution de 1946, renvoyant à cette conception et posant l'interdiction de dégrader ou d'asservir la personne humaine, s'inscrivent dans une conception objective des droits et libertés à partir et sur le fondement de laquelle sont déclinés des droits subjectifs (liberté d'aller et de venir, droit à la sureté, au travail…). Plus généralement cette analyse se rattache à l'idée selon laquelle une Constitution ne renvoie pas à des valeurs communes (V. B. Mathieu, Constitution : tout bouge et rien ne change : Lextenso, 2013) mais se borne à énumérer des droits concernant des individus.

Ensuite la notion de « question de société » se conçoit instinctivement comme renvoyant aux questions qui intéressent la société dans son ensemble. Elle est juridiquement dépourvue de portée. Ainsi la Constitution a vocation à traiter des questions qui intéressent la société. Elle traite de certaines d'entre elles (l'environnement, l'égalité des sexes…), elle ne les appréhende pas toutes (la définition de la famille n'est pas inscrite dans le texte même dans la Constitution). De la même manière, pour revenir à la question du mariage, si la famille est une question de société, c'est aussi une question sociale au regard des dispositions du Préambule de 1946. Il est ainsi paradoxal de considérer que le caractère de généralité et d'intérêt pour l'ensemble de la Nation permettant de formaliser un PFRLR ne puisse être retenu s'agissant d'une question de société.

Cette analyse n'est pas nouvelle. Elle s'exprime cependant avec plus de force aujourd'hui. Certes la formule de Jean Rivero, répétée à l'envi, mais qui trouve ici un écho particulier, selon laquelle le Conseil « filtre le moustique et laisse passer le chameau », date de 1981, mais alors même qu'il s'était montré prudent, le Conseil avait en 1994 dégagé à l'occasion de l'examen de la première loi de bioéthique la valeur constitutionnelle et la fonction matricielle du principe de dignité et fondé sur lui un certain nombre de principes législatifs dont le respect de la vie dès son commencement. Aujourd'hui les choses sont clairement dites : l'interruption de grossesse, la sélection des embryons, la définition du mariage, les liens de filiation… sont des questions de société qui relèvent de la libre compétence du législateur et auxquelles le contrôle de constitutionnalité ne s'intéresse pas.

Si l'on peut comprendre la réserve d'un juge peu assuré de sa légitimité démocratique (ce qui vaut pour tout juge), on peut s'interroger sur le fait que cette timidité intéresse de telles questions et surtout sur les conséquences qu'il convient d'en tirer. N'insistons pas sur le fait que les questions les plus fondamentales pour la société et qui concernent par exemple les débuts et la fin de la vie, la famille, le clonage… sont entièrement entre les mains du législateur, sans bénéficier de la garantie du contrôle de constitutionnalité. On pourrait ne pas être entièrement rassuré ! Mais, sur un plan plus juridique, que signifie le droit au mariage si ce mariage est librement défini par le législateur (entre personnes de même sexe ou non, entre deux ou plusieurs) que signifient les droits de la femme à l'heure de l'instauration du genre, que signifie l'interdiction de discriminer selon la race, alors que la loi est expurgée de toute référence à ce terme, que signifient enfin les droits de l'homme, alors que la personne qui en bénéficie pourrait être reconnue par la loi comme l'être humain né depuis quinze jours ou celui qui a toute sa conscience ?

Bien sûr l'on peut considérer qu'il s'agit d'une démonstration par l'absurde et que les juges constitutionnels sauraient protéger la société de telles dérives. Mais en tous cas relevons qu'ils se sont privés des instruments pour le faire. Le concept de question de société est commode à l'heure où le juge prenant peur de sa propre puissance préfère l'exercer sur des terrains plus mineurs. Entre l'interventionnisme traditionnel de la Cour EDH et l'extrême réserve du Conseil constitutionnel, la recherche d'une troisième voie s'impose.

Bertrand MATHIEU

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24 avril 2013 3 24 /04 /avril /2013 20:45

la casquette de jurister impose de laisser de cote certaines de ses convictions

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20 avril 2013 6 20 /04 /avril /2013 18:45
Sous les brumes de Rio
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14 avril 2013 7 14 /04 /avril /2013 12:35
depuis les brumes de Rio
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29 mars 2013 5 29 /03 /mars /2013 17:50

photo

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20 mars 2013 3 20 /03 /mars /2013 17:50
file://localhost/Users/bertrandmathieu/Desktop/Accédez%20à%20la%20vidéo.webloc
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20 mars 2013 3 20 /03 /mars /2013 17:34
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11 mars 2013 1 11 /03 /mars /2013 14:42
Constitution : Rien ne bouge et tout change
LE 6 MARS 2013 21H27 | PAR SAMUEL LE GOFF
Les éditions Lextenso viennent de publier un ouvrage de Bertrand Mathieu, intitulé « Constitution : rien ne bouge et tout change », où il présente, de manière succincte mais synthétique, les grands enjeux et les mutations du droit constitutionnel. Cet ouvrage est intéressant à plusieurs titres, pour les personnes qui s’intéressent au Parlement, au droit parlementaire et aux institutions en général.

On apprend dans ce livre que le droit constitutionnel évolue énormément, alors même que les textes constitutionnels ont formellement assez peu évolué, mis à part quelques toilettages, depuis 1958. Pourtant, quelques réformes en apparence anodines pour les profanes, ont amené de grands bouleversements. C’est par exemple la montée en puissance du Conseil constitutionnel, dont le rôle de contrôle a priori des lois a pris son envol en 1971-1974, et qui vient, depuis 2010, de se lancer dans le contrôle a posteriori. Nombre d’équilibres ont été modifiés avec l’irruption de cet acteur que l’on n’attendait pas, mais dont l’émergence est finalement assez logique et dans l’air du temps, quand on regarde comment cela se passe dans les autres pays. L’autre élément majeur, qui va de pair avec la montée en puissance des juges, c’est le basculement du droit constitutionnel de l’étude des mécanismes institutionnels de répartition et d’exercice du pouvoir, vers l’étude des droits fondamentaux, de leur place et de leur influence dans le système juridique. L’autre grand sujet qui intéresse les constitutionnalistes est l’articulation, complexe et toujours mouvante, entre le droit constitutionnel national et « l’ordre constitutionnel européen », que ce soient les traités ou la Convention européenne des droits de l’homme.

Ce livre est donc intéressant, car il permet d’avoir une idée de ce qu’est aujourd’hui le droit constitutionnel, ses problématiques et ses axes de travail. Il est aussi très intéressant par ce qu’il nous apprend des professeurs de droit constitutionnel…

L’auteur est un professeur de droit public « au sommet » de sa carrière. Professeur à Paris I Panthéon-Sorbonne, directeur du Centre de recherche en droit constitutionnel de cette université, président de l’Association française de droit constitutionnel, ancien membre de la commission Balladur, actuel membre du Conseil supérieur de la Magistrature. Autant dire qu’il est tout, sauf un marginal dans le milieu de la recherche en droit constitutionnel. On peut donc légitimement penser qu’à quelques nuances près, il exprime des positions dans lesquelles les autres membres de la « corporation » se retrouvent globalement.

La montée en puissance des juges, et pas seulement du juge constitutionnel, occupe beaucoup de place dans ce livre, avec une forte influence de Pierre Rosanvallon pour ce qui est de la légitimité politique du pouvoir des juges dans le système institutionnel et politique. Sur 192 pages, les questions « institutionnelles » pures, celles relatives à la répartition des pouvoirs entre organes politiques, sont traitées de la page 171 à la page 182. 11 pages en fin de livre, pour nous dire que le texte de la Constitution relatif à la répartition des pouvoirs entre le Président de la République, le Premier Ministre et le Parlement tiennent largement de la fiction, et que la pratique diffère du texte. Par contre, la régulation du « pouvoir » judiciaire à travers l’organisation du CSM est traitée des pages 129 à 145 et la QPC, des pages 150 à 170.

J’ai lu ce livre comme la description assez saisissante du recul des politiques face aux juristes. Les notions sur lesquelles reposent la légitimité des politiques sont critiquées, que ce soit le concept de souveraineté, ou encore celle de démocratie, où on voit poindre la revendication d’une supériorité de l’interprétation (écrite par les juristes) de la Constitution et des droits fondamentaux, sur la loi (écrite par les politiques) et surtout, une affirmation que la légitimité démocratique ne procède pas nécessairement exclusivement du suffrage. Il affirme par exemple que la vraie séparation des pouvoirs, aujourd’hui, n’est pas l’exécutif et le législatif, mais entre les politiques et les juges (entendez les juristes). Il pose aussi de bonnes questions, avec des développements intéressants sur la légitimité de cette montée en puissance du droit et donc des juges, ses éventuelles limites, et sur la régulation de ce pouvoir des juges. Les développements sur le Conseil supérieur de la Magistrature sont particulièrement d’actualité, et posent un débat de fond sur lequel il faudra trouver des solutions pérennes.

Ce livre permet de se rendre compte à quel point l’intégration européenne a été un moteur puissant dans cette évolution, les principales réformes constitutionnelles étant plus ou moins « forcées » même si on ne s’en est pas toujours rendu compte. La construction européenne a d’abord été l’affaire de juristes, et ils ont donc construit un système à leur main, avec une intégration par le droit. Les soubresauts de la construction européenne peuvent ainsi être analysés comme celle d’une lutte entre le juriste et le politique. Il faut reconnaître que les juristes ont une longueur d’avance, et qu’ils se sont dotés, ce livre en est un bel exemple, d’une véritable armature doctrinale pour légitimer leur prise de pouvoir.

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11 mars 2013 1 11 /03 /mars /2013 14:36
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